Les enjeux de biodiversité, en passe d’être formalisés pour les centrales solaires au sol

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Les développeurs solaires ont la responsabilité d’évaluer l’efficacité des mesures mises en place pour limiter l’impact d’une centrale au sol sur la biodiversité. Mais évaluer l’impact réel d’une installation sur l’environnement peut prendre plusieurs années. « Il y a un besoin de lancer des études plus longues, adaptées au délai de réponse des écosystèmes naturels à une nouvelle pression exercée par l’homme », explique Véronique de Billy, coordinatrice « Energie renouvelable et biodiversité » à l’Office Français pour la Biodiversité (OFB) lors d’un entretien avec pv magazine France.

A ce jour, les projets solaires au sol se construisent selon la séquence « éviter, réduire et compenser » : on cherche à éviter les impacts sur l’environnement, sinon à les réduire et, en troisième option, à les compenser. « Les impacts sur l’environnement dépasse la seule prise en compte de la biodiversité, pour englober l’ensemble des thématiques de l’environnement (air, bruit, eau, sol, santé des populations…) », précise le Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Elle s’applique, « de manière proportionnée aux enjeux » dans les études d’impact préliminaires et, depuis 2017, dans l’obtention de l’autorisation environnementale.

« Il y a un fort enjeu de proposition de solutions visant à concilier le déploiement des énergies renouvelables et de la biodiversité, ceci dans un objectif d’accompagnement des politiques de l’Etat en termes d’énergie (souveraineté, décarbonation) et de préservation de la biodiversité », affirme Véronique de Billy. Le nouvel Observatoire des énergies renouvelables et de la biodiversité est d’ailleurs avancé comme une instance qui permettra la cohérence et la conciliation des politiques sectorielles liés au développement des énergies vertes et au maintien de la biodiversité sur le territoire.

Quid de l’observatoire des EnR et de la biodiversité

Le nouvel observatoire bénéficiera dans un premier temps de financements de l’Ademe (en fonds propres) et de l’OFB qui flèchera notamment des financements du programme européen LIFE. « A terme nous imaginons de mettre en place des appels à manifestation d’intérêt, qui pourront le cas échéant bénéficier de financement privés », confie Véronique de Billy. L’observatoire évolue sous la double-tutelle du ministère chargé de l’énergie (Bercy) et de celui en charge de l’environnement (Transition écologique et de la Cohésion des territoires).

« Beaucoup d’actions ont été entreprises au cours des dernières années et il y avait besoin de mutualiser ces connaissances et d’organiser leur transfert au plus grand nombre », ajoute Véronique de Billy pour justifier la création de la nouvelle instance. Les missions de l’observatoire sont articulées autour de trois axes :

  • faire l’état des lieux et le bilan des connaissances et des pratiques mises existantes. C’est d’ailleurs pour cette raison que sa création figurait dans la loi.
  • soutenir l’expertise scientifique collective. « Nous ne ferons pas de R&D en propre, mais nous pouvons lancer des missions sur des points précis, par exemple sur un aspect technique en particulier ».
  • être un centre de ressource et de transfert de connaissances. Citoyens, collectivités, financiers, services instructeurs ou encore industriels pourront profiter des connaissances acquises et de la diffusion de l’information sur la conciliation, les enjeux relatifs à la biodiversité, l’impact des installations sur les sols, l’ampleur de cet impact ou encore les solutions déployées et/ou envisagées.

« Enfin, notre rôle est aussi d’accompagner l’ensemble de la chaine d’acteurs en amont de leurs missions de financement, de planification, de conception ou d’instruction des projets », déclare Véronique de Billy. L’observatoire pourra produire des « lignes directrices » ou bien des guides techniques, « par exemple sur l’éco-conception des projets » ou sur des choix de financement vertueux. Dans ce cadre, l’OFB avait déjà produit deux guides avec l’Ademe pour la filière photovoltaïque, à savoir, « Photovoltaïque, sol et biodiversité : enjeux et bonnes pratiques » en 2023 et « Impacts écologiques des clôtures et solutions de remédiation possibles ».

Financement d’études publiques sur les impacts ?

Un autre projet est en cours avec le Syndicat des énergies renouvelables (SER) et Enerplan pour développer des protocoles pour le déploiement du solaire au sol et flottant. Les travaux visent d’abord à standardiser et harmoniser la méthodologie pour faire un état initial – afin de permettre, ensuite, d’opérer plus efficacement le suivi d’impact et d’efficacité des mesures. En finançant ce projet, l’OFB a pour objectif d’assurer la robustesse technique et scientifique des résultats.

Côté R&D publique, Véronique de Billy signale également que plusieurs études sur les incidences du photovoltaïque sur les milieux naturels et les solutions de remédiation ont été lancées en 2023.

Le projet ENVOLtaïque vise à étudier les incidences du photovoltaïque au sol sur les cortèges d’espèces d’oiseaux avec Auddicé biodiversité, Auddicé environnement et le Muséum national d’histoire naturelle. « En fonction des premiers résultats, nous viserons peut-être certaines espèces en particulier ».

Avec la Ligue de protection des oiseaux (LPO), le Muséum national d’histoire naturelle et la Compagnie Nationale du Rhône, l’OFB a aussi produit un guide et une publication en 2023 sur l’effet des centrales au sol sur les chiroptères (chauve-souris).

L’agence a aussi financé le projet Hydrindic qui opère « un suivi et une évaluation de la restauration/création de zones humides avec un indicateur hydrologique », et qui servira pour des critères et indicateurs relatifs au développement du photovoltaïque au sol.

Véronique de Billy évoque également le projet PIESO (Processus d’Intégration Ecologique de l’Energie Solaire), un programme initié en 2016 sur financement de l’Ademe, coordonné par ECO-MED en partenariat avec une équipe de chercheurs de l’IMBE de Marseille et d’Avignon et Total Quadran (devenu TotalEnergies renouvelables), qui a permis de publier deux guides d’aide à l’éco-conception des projets et à leur suivi.

Les associations ne sont pas en reste et ont elles aussi produit plusieurs études visant à définir des points de vigilance, des références, des bonnes pratiques et à soulever les enjeux associés au développement solaire au sol. Energie Partagée a produit une charte Photovoltaïque au sol en 2023, la WWF un rapport « Photovoltaïque au sol » la même année et France Nature Environnement (FNE) un Photoscope en 2022.

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