Un consortium franco-allemand utilise les satellites pour la prévision infrajournalière du photovoltaïque

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Anticiper l’impact de la production variable des systèmes photovoltaïques sur l’exploitation des réseaux basse tension : c’est l’un des objectifs majeurs du projet de recherche appliquée EO4ER (« Earth Observation for Energy Risks »), qui s’appuie sur des données satellitaires de nouvelle génération pour produire des prévisions de production solaire à l’échelle horaire.

EO4ER a été sélectionné par l’Agence Spatiale Européenne (ESA) dans le cadre de l’initiative Destination Earth (DestinE), un programme européen ambitieux visant à développer progressivement un jumeau numérique ultra-précis de la Terre pour surveiller et simuler les phénomènes naturels, les risques et les activités humaines associées.

Dans ce cadre, EO4ER est le seul projet retenu dans le domaine de l’énergie. Il est porté par un consortium franco-allemand réunissant trois acteurs : OHB Digital Services, entreprise spécialisée dans le développement de logiciels et de solutions numériques pour l’industrie spatiale ; le groupe de recherche Smart Grids de la Hochschule Ulm (THU), qui mène des travaux appliqués sur la gestion intelligente des réseaux électriques ; et Reuniwatt, société qui conçoit des solutions d’estimation et de prévision de la couverture nuageuse et de la production d’énergie solaire à partir de données satellitaires et météorologiques.

Le projet a été présenté début février 2025 aux équipes de l’ESA et aux autres lauréats de DestinE, lors de la réunion ESA Digital Twin Earth Components: Open Science Meeting, organisée à Frascati, en Italie. Lancé en octobre 2024, le programme EO4ER étudie deux cas d’usages, à savoir la prévision journalière du productible solaire pour le basse tension et l’évaluation de l’impact du changement climatique sur la production photovoltaïque. Les premiers résultats sont prévus pour novembre 2025.

Un jumeau numérique, deux cas d’usage

Concrètement, le projet prévoit de développer un prototype de composant de jumeau numérique, capable de modéliser le village de Hittistetten, en Allemagne. Cette localité a été retenue comme « zone test » afin de valider les méthodes développées. Un jumeau numérique est une réplique numérique fidèle d’une opération ou d’un système, utilisée à différentes fins, notamment pour réaliser des comparaisons ou simuler des scénarios.

Le village de Hittistetten a été choisi pour servir de zone test pour le volet énergie solaire en basse tension, en raison de son fort taux d’équipement photovoltaïque : 80 des 120 foyers y sont déjà dotés de panneaux solaires. Les habitants ont par ailleurs démontré une forte volonté de participer à la transition énergétique, tout comme le gestionnaire de réseau basse tension local qui est également associé au projet.

Le premier cas d’usage vise à développer des prévisions de production solaire à l’échelle du réseau basse tension, avec une granularité infrajournalière, permettant ainsi des prévisions précises sur quelques heures. Ces informations seront intégrées dans un outil de visualisation, développé par OHB Digital Services, à destination du gestionnaire de réseau et des « consomm’acteurs ».

« L’idée était d’utiliser les améliorations apportées par la nouvelle génération de satellite géostationnaire MTG », explique à pv magazine France Marion Lafuma, responsable du développement commercial chez Reuniwatt. Et pour cause : la série de satellites MTG (Meteosat Third Generation), opérationnelle depuis le 4 décembre 2024, offre une résolution spatiale de 500 mètres (contre 1 à 3 kilomètres pour les précédents satellites MSG) et une résolution temporelle de 10 minutes (contre 15 minutes pour les MSG). Le projet EO4ER servira donc également à comparer les résultats obtenus grâce à ces nouvelles capacités d’observation de la Terre avec ceux issus des technologies précédentes.

« La prévision à court terme basée sur les données de MTG permet aux opérateurs de réseaux de distribution d’assurer un fonctionnement sécurisé de leurs infrastructures, même avec une utilisation plus intensive due à l’injection photovoltaïque » précise le Professeur Gerd Heilscher, responsable du groupe de recherche sur les réseaux intelligents à la THU.

Le second cas d’usage relève de la climatologie puisqu’il vise à regarder les impacts du changement climatique sur la production des panneaux solaires. « C’est un sujet qui semble émerger auprès de nos clients et plus largement dans le secteur solaire », explique Marion Lafuma. Dans ce cas, l’étude ne se limite pas à Hittistetten : plusieurs zones géographiques seront prises en compte. Les paramètres analysés incluront la température, la neige, le vent, ainsi que d’autres données météorologiques, mises en perspective avec différents scénarios du GIEC. « Les investissements massifs dans les énergies renouvelables sont exposés aux risques du changement climatique et nécessitent des outils pour les gérer », rappelle Gerd Heilscher.

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