« 2025 va être une année charnière dans le déploiement du programme des énergies renouvelables en Algérie », assure Boukhalfa Yaïci, directeur général de Green Energy Cluster Algerie, chargé de suivre la progression des renouvelables dans le pays. L’année devrait en effet être marquée par l’entrée en exploitation des premières centrales solaires photovoltaïques des trois rounds d’appels d’offres lancés en 2023 totalisant 3 200 MWc.
Le premier, de 1 GW, portait sur la construction de cinq centrales, allant de 50 à 300 MWc de puissance unitaire, tandis que le second, de 2 GW, consistait en la réalisation en EPC (Engineering, Procurement et Construction) de 15 centrales PV allant de 80 MWc à 220 MWc. Enfin, 200 MW ont été attribués pour une centrale avec stockage à base de batteries pour le projet minier de Gara Djebilet (Tindouf). Selon les informations de pv magazine France, les travaux de génie civil et de terrassement des sites ont bien avancé et les premières centrales pourraient être livrées dès la fin de 2025, voire début 2026. Toutefois, suite à la résiliation des contrats de Cosider et Fimer pour des « défauts d’engagements contractuels » qui n’ont pas été détaillés, l’appel d’offres pour trois des centrales PV basées à Kenadsa (120 MWc), à Touggourt (150 MWc) et à Tamacine (250 MWc) a été relancé par la Sonelgaz (société algérienne d’électricité et de gaz). La clôture d‘envoi des dossiers étant prévue le 6 février 2025, un ou plusieurs nouveaux lauréats devraient être connus prochainement.
Un nouvel appel d’offres en préparation
Parallèlement, toujours selon nos sources, un nouvel appel d’offres de grande ampleur pourrait être lancé probablement avant la fin de 2025 voire début 2026. Il n’est cependant pas encore certain que celui-ci sera à nouveau en EPC, comme les précédents, ou bien en IPP, un choix de la contractualisation aujourd’hui privilégié dans la majorité des pays pour des raisons de coûts. Le lancement de ce nouvel appel d’offres s’inscrit en effet dans le cadre de l’objectif national visant à installer une capacité totale de 15 GW d’ici à 2035. A titre de comparaison, fin 2023, l’Algérie disposait d’une capacité photovoltaïque de 436,8 MW, selon le dernier baromètre du Commissariat aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique (CEREFE).
Pour changer de braquet, le pays a donc fait le choix de développer le solaire à grande échelle. La présidence algérienne a la volonté politique de pousser la transition énergétique pour diversifier ses sources de production d’électricité, aujourd’hui issues à 99 % du gaz naturel local. Toutefois, ces réserves de gaz n’étant pas inépuisables, utiliser les sources renouvelables pour la production domestique d’électricité, en augmentation, permettrait d’augmenter les recettes issues des exportations de gaz.
Le timide marché du solaire commercial et industrie (C&I)
Mais si le solaire à grande échelle répond à une stratégie nationale, le marché du petit et moyen solaire en toiture chez les particuliers et les industriels (le solaire C&I) se heurte à plusieurs obstacles qui ralentissent son essor et son adoption. « Compte-tenu des prix de l’électricité du réseau, qui sont très faibles en Algérie, de l’ordre de 0,03 €/kWh, il n’est pas vraiment rentable d’investir dans l’installation d’une centrale photovoltaïque », relate Raouf Zemmit, de l’entreprise algérienne ZF Tech. Autrefois bureau d’études, la société est devenue en 2023 EPCiste et travaille sur le solaire en C&I, essentiellement pour des entreprises étatiques. Pour l’heure, elle a réalisé environ 500 kW et espère passer à 1,5 MW à la fin du premier semestre 2025, en raison de leur volonté de solariser leurs bâtiments.
Autre obstacle : l’absence d’un modèle de type Feed-in-Tariff ou net-metering à destination du secteur solaire résidentiel et C&I ne permet pas de valoriser leur électricité. « Les industriels ne peuvent faire que de l’autoconsommation, ce qui réduit la rentabilité économiques des projets », analyse Amine Ait Oudhia, PDG et fondateur de l’entreprise EPC solaire Evotrik. Pour autant, ils sont de plus en plus nombreux à engager des travaux de solarisation, surtout parmi les groupes internationaux : leurs motivations sont alors surtout portés par leur démarché RSE. De plus, avec l’arrivée en 2026 de la taxe carbone aux frontières de l’Union européenne, les entreprises exportatrices doivent baisser le contenu carbone de leurs produits.
Parmi ses derniers projets réalisés, Evotrik a ainsi participé à la réalisation, avec l’entreprise algérienne Ayeco Consult, d’un système photovoltaïque de 550 kWc sur la toiture du laboratoire pharmaceutique Novo Nordisk à Tizi Ouzou. Les 1 148 panneaux solaires, de fabrication locale, couvrent jusqu’à 35 % de la consommation totale d’énergie de l’usine pendant les heures d’ensoleillement. Plus récemment, il a aussi développé une centrale de 60 kWc, pour le compte d’un autre laboratoire pharmaceutique. Pour se positionner sur le marché algérien du photovoltaïque en pleine structuration, la société s’est diversifiée et a créé Evosun pour la réalisation de projets solaires, en particulier dans les segments de marché des centrales solaires en toiture et au sol, ainsi que pour le pompage solaire. Elle a en outre mis en ligne Future Power Store, un site de vente de modules PV, d’onduleurs et de régulateurs de charge… « L’objectif est de disposer d’un entrepôt à Alger avec des stocks locaux, pour raccourcir les délais de livraison », précise Amine Ait Oudhia, dont l’entreprise représente plusieurs marques dans le pays, comme SMA, ZCS Azzurro (onduleurs, pompage solaire, bornes de recharge), Stecca (bornes de recharge), JA Solar, ou encore Staübli et Deye (onduleurs).
« Le marché du solaire en Algérie est caractérisé par de petites installations de quelques kilowatts, comme des écoles raccordées au réseau qui consomment l’énergie produite sans possibilité d’injecter le surplus, ou de grandes centrales solaires raccordées au réseau de transport dont la puissance commence à 50 MWc, poursuit Boukhalfa Yaïci. Entre les deux, il n’y a quasiment rien ». Pourtant, selon lui, le potentiel dans le pays du solaire C&I de moyenne taille pourrait s’élever à 6 à 7 GWc, ce qui permettrait de couvrir 30 % de la demande énergétique finale des secteurs considérés. Qui plus est, ce type de systèmes ne nécessite pas d’important renforcement réseau car la production étant au plus près du lieu de consommation, les pertes dans le transport et la distribution de l’énergie électrique sont réduites. C’est pourquoi il pourrait être intéressant pour le pays de renforcer son développement par l’édition de normes et l’autorisation de l’injection et de la vente du surplus d’électricité.
A suivre : la chaîne de valeur du solaire se structure et rêve d’export
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