Les formats de plaquettes et de cellules photovoltaïques ont subi des changements importants en 2020, qui se répercutent désormais sur les fabricants de modules européens. Quelle est votre expérience en termes de disponibilité dans les anciens formats (inférieurs à M6) et les nouveaux formats ?
Nicolas Faivre, Business Development Manager de Voltec Solar : Notre usine de Dinsheim-sur-Bruche, près de Strasbourg, a une capacité de production de 200 MW (soit environ 500 000 panneaux) et possède deux chaînes de production pour nos deux gammes principales actuelles. Le Tarka 120 est équipé de 120 demi-cellules monocristallines G1 p-PERC, pour des puissances de 320 à 330 W. Le format est aussi disponible en configuration 144 demi-cellules (Tarka 144) sur demande, généralement pour des centrales au sol, de 385 à 395W. Mais ces formats arrivent progressivement en fin de vie, car si la demande reste forte en Europe pour ces produits, les fabricants asiatiques passent sur des formats supérieurs : M6, voire M10 et M12. La filière évolue et nous devons donc nous adapter.
Nous sommes spécialisés sur des solutions ultra bas carbone et innovantes pour correspondre aux exigences des appels d’offres de la CRE. Ainsi, pour obtenir le contenu CO2 le plus faible, notre silice est extraite en Norvège, où elle est transformée en silicium métal puis en wafers. La Norvège possède en effet un mix énergétique bas carbone, grâce aux barrages hydrauliques. En revanche, l’étape de la métallisation de la cellule est réalisée en Chine avant qu’elle ne soit réexpédiée en France, où nous effectuons la découpe. Il n’y a pas à ce jour de fournisseurs européens qui offre un poids carbone bas, tout en étant compétitif. Compte-tenu de l’évolution de toutes les chaînes de cellules en Asie vers des formats plus grands, nous allons donc devoir aussi faire migrer nos produits vers des formats plus grands, car si nous ne le faisons pas, nous risquons de passer sur des commandes spéciales qui seront beaucoup plus chères.
Vous prévoyez donc des investissements prochainement ?
En effet, nous allons réaliser les modifications de nos lignes en juillet pour démarrer en septembre 2021 deux nouvelles gammes, respectivement le Tarka 128 VSMD 390 W et le Tarka 138 VSMD 425 W, 9 busbars, option bifacial, sur une architecture électrique brevetée, permettant d’allonger les strings jusqu’à 50 modules. Cela entraînera des modifications au niveau des stringers et des interconnections pour passer de cinq à neuf busbars. Nous prévoyons également de modifier nos laminateurs afin d’accepter des tailles de modules complémentaires et de proposer de nouveaux modules ultra légers, compacts, et hyper performants, déjà lauréats sur des projets d’innovation.
En tout, l’investissement représente environ 2,5 millions d’euros avec un niveau d’automatisme et de contrôle renforcés. Or, nous avons investi dans nos stringers en M4 il y a moins de deux ans, en 2019. On ne pensait pas que l’évolution des formats irait aussi vite. Les changements sont plus rapides que le temps de rodage puis d’amortissement des machines. C’est pourquoi nous avons choisi des stringers adaptés aux formats M10 et M12. Il ne faut pas non plus oublier qu’en raison de notre positionnement sur des solutions à haut contenu européen et bas carbone, nous travaillons exclusivement avec des fournisseurs de machines européens, certes beaucoup plus chers que leurs confrères chinois, mais fiables, disponibles et réactifs en cette période de pandémie globale.
Qui sont-ils par exemple ?
Les stringers sont fournis par Teamtechnik de Stuttgart, la découpe des cellules sous technologie laser TLS Dicing est effectuée sur une 3D-Micromac de Chemnitz, et les laminateurs mutli-stack Ypastor SL de Bürkle en Forêt Noire. Les stations de contrôle de micro-cracks par électroluminescence sont réalisées par l’Allemand MBJ Solutions. Le reste de la chaine, l’automatisme par l’Italien Ecoprogetti principalement. Toute cette proximité assure un service de qualité. Notre activité bénéficie à toute la chaine de valeur PV européenne.
Pensez-vous qu’il serait bénéfique pour vos opérations d’avoir une production de cellules localisée en Europe ?
Ce serait une bonne chose que l’Union européenne comprenne l’urgence de retrouver une indépendance sur la supply chain et de créer des emplois qualifiés, dynamisant une R&D dépendante de l’activité industrielle. Certaines initiatives sont d’ailleurs à noter, comme REC en France ou Meyer Burger en Allemagne. Il faudrait pour cela que l’Europe mette en place un cadre réglementaire favorable et protecteur pour ces fabricants qui démarrent et persévèrent en Europe. Parmi les leviers, cela pourrait être les aspects RSE, les impacts environnementaux, une taxe carbone aux frontières, la mise en place de labels indexant l’innovation, l’empreinte environnementale, la performance du produit, la réparabilité, le recyclage… Il existe beaucoup de leviers, mais tous les pays n’ont pas les mêmes contraintes.
En effet, c’est aussi une question beaucoup plus complexe qu’elle n’y paraît. Ainsi, pour moi fabricant français, les critères principaux à remplir sont la fiabilité, le prix et le contenu carbone, alors qu’un client allemand cherchera par exemple un rendement plus élevé ou du Made in Germany. De plus, il existe une grande disparité dans les mix énergétiques entre les pays européens. Par exemple, du fait du recours au charbon, l’intensité carbone du mix électrique en Allemagne est bien plus élevée qu’en France, de l’ordre de 400g équivalent CO2 par kWh, contre 55 grammes uniquement en France. Le retour sur carbone investi d’un panneau PV est donc beaucoup plus long en France, environ 11 ans pour un panneau très bas carbone et plus de 20 ans pour un panneau standard asiatique ou à haut contenu asiatique. Une uniformisation sur cette question serait bénéfique, mais tous les pays n’avancent pas à la même vitesse.
Ce contenu est protégé par un copyright et vous ne pouvez pas le réutiliser sans permission. Si vous souhaitez collaborer avec nous et réutiliser notre contenu, merci de contacter notre équipe éditoriale à l’adresse suivante: editors@pv-magazine.com.
En transmettant ce formulaire vous acceptez que pv magazine utilise vos données dans le but de publier votre commentaire.
Vos données personnelles seront uniquement divulguées ou transmises à des tierces parties dans une optique de filtre anti-spams ou si elles s’avèrent nécessaires à la maintenance technique du site web. Un transfert de vos données à des tierces parties pour toute autre raison ne pourra se faire que s’il est justifié par la législation relative à la protection des données, ou dans le cas où pv magazine y est légalement obligé.
Vous pouvez révoquer ce consentement à tout moment avec effet futur, auquel cas vos données personnelles seront immédiatement supprimées. Dans le cas contraire, vos données seront supprimées une fois que pv magazine aura traité votre requête ou lorsque le but du stockage des données est atteint.
Pour de plus amples informations sur la confidentialité des données, veuillez consulter notre Politique de Protection des Données.