Une équipe internationale menée par Julian Steele à l’université KU Leuven en Belgique prétend avoir mis au clair un procédé de fabrication qui permet de sceller la phase du CsPbI3, l’un des matériaux pérovskites les plus prometteurs pour les applications dans le photovoltaïque. Cette avancée offre un levier précieux pour contrer l’instabilité intrinsèque de ces matériaux.
« Un des principaux obstacles au déploiement commercial des cellules solaires à pérovskites est leur instabilité », explique Julian Steele. « Le coût de leurs ingrédients est bas, leur efficacité monte en flèche, mais leur stabilité reste problématique. »
Toutes les variantes de pérovskites découvertes à ce jour sont chimiquement sensibles. Leur exposition à l’air, à l’humidité, à la lumière et à la chaleur peut altérer les liaisons chimiques dans ces matériaux et les dégrader. Julian Steele explique que l’incorporation de césium dans la formulation du CsPbI3 rend le matériau plus robuste, mais introduit en revanche une instabilité de phase, soulevant un nouveau risque pour les fabricants de cellules solaires que les molécules modifient leur agencement à tout moment.
Polymorphes
Cette propriété, dite de polymorphisme, est déconcertante pour les industriels. À plus de 320 °C, le CsPbI3 adopte une structure cristalline qui le rend noir et opaque, mais à température ambiante il a tendance à reprendre une configuration amorphe qui le rend jaunâtre. Cette nouvelle forme réduit considérablement l’absorption de lumière ainsi que l’efficacité de toute cellule solaire dans laquelle serait incorporé le matériau.
Depuis des années, le processus qui régit la transformation de phase dans le CsPbI3 demeure incompris. Les chercheurs parviennent à imposer une phase cristalline en incorporant de nouveaux composés chimiques dans leurs couches de pérovskites ou en altérant la taille des cristaux qui les composent. Mais personne n’est encore parvenu à expliquer pourquoi ces astuces résolvent le problème. Un casse-tête récurant est pourquoi des couches recuites dans des conditions identiques deviennent parfois jaunes et parfois noires lorsqu’elles refroidissent à température ambiante.
Haute tension
Des mesures menées au European Synchrotron Radiation Facility (ESRF) de Grenoble en France ont récemment permis d’identifier un suspect principal derrière cette transition de phase : le substrat sur lequel la couche de pérovskite est déposée.
Dans un article paru ce mois-ci dans la revue scientifique Science, Julian Steele explique que la jonction entre la couche de pérovskite et la surface de verre sur laquelle la pérovskite est fabriquée peut engendrer une tension au sein de la couche capable d’y imbriquer la phase désirée.
Selon l’étude à laquelle ont contribué 11 centres de recherche répartis sur trois continents, l’interface entre la pérovskite et son substrat, formée lors du recuit à haute température, subsiste même après le retour à température ambiante. Si la chute de température est assez abrupte, la pérovskite peut retenir la maille cristalline de cette interface et s’y adapter.
« Comme un accordéon, la couche de pérovskites s’étend lorsqu’on la chauffe », explique Julian Steele. « Lorsqu’on la refroidit, cette couche tente de se comprimer à nouveau mais l’interface qu’elle a formé avec le substrat la maintient étendue. Nous avons démontré dans notre étude que cette tension entre la couche de pérovskites et le substrat peut être exploitée pour stabiliser la phase cristalline qui rend les couches de pérovskites noires. »
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