[Enquête] En copropriété, photovoltaïque rime avec rénovation énergétique

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Peu de chiffres circulent sur le nombre de copropriétés équipées d’installations photovoltaïques en France. Quelques dizaines tout au plus, inégalement réparties sur le territoire et souvent le fruit d’initiatives et d’engagements personnels au sein d’un Conseil syndical. Pour les professionnels du solaire, la copropriété constitue encore un marché de niche, minoritaire malgré les avantages environnementaux et financiers de pouvoir produire et consommer sa propre électricité, et même la revendre à un tarif préférentiel.

Même si, depuis la loi APER, la majorité simple suffit à un conseil syndical pour approuver un projet de solarisation, différents facteurs freinent le développement du photovoltaïque au sein des copropriétés, et ce quelle que soit leur taille. En premier lieu, le peu de soutien au financement. ll faut savoir que les projets d’équipement photovoltaïque ne bénéficient pas d’aides, contrairement à l’installation de panneaux solaires thermiques, qui entre dans le périmètre du dispositif MaPrimeRénov’, dont on a appris, récemment, qu’il pourrait être amputé de 700 millions d’euros en 2025…

Ainsi, pour se voir accorder, par exemple, un éco-PTZ, une « copro » doit pouvoir intégrer le photovoltaïque dans un projet global de rénovation énergétique. Ou alors choisir de poser des panneaux mixtes, produisant à la fois de l’électricité et de la chaleur, pour fournir à l’immeuble une partie de l’énergie nécessaire à la production d’eau chaude sanitaire. Les banques consentent, certes, des prêts pour travaux, mais le montant des intérêts augmente les frais. En matière de rentabilité, la compétitivité du solaire résulte donc uniquement des économies qu’elle permet à la copropriété et aux ménages de réaliser en produisant et en consommant et/ou en leur revendant.

L’autoconsommation, principal levier de développement

Outre les sommes à investir, la mise en œuvre d’une installation solaire peut aussi refroidir les ardeurs des copropriétaires, craintifs d’un préjudice esthétique, d’une détérioration de la toiture, de pannes ou simplement inquiets face à l’ampleur d’un projet de solarisation.

Auteur du guide « Installations photovoltaïques dans une copropriété », rédigé en collaboration avec l’association Hespul et sorti en octobre 2024, Christophe Levrel, de l’Association des Responsables de Copropriété (ARC), le confirme à pv magazine France : « Ça a l’air simple de poser des panneaux, mais c’est un investissement relativement lourd, à long terme, et d’autant plus rentable si on arrive à bien cibler la destination de l’électricité produite. Si c’est produire pour produire et simplement revendre, ça a peu de sens. L’autoconsommation, individuelle ou collective, c’est à mon avis le maître mot. C’est un levier très important pour le développement du photovoltaïque en copropriété ». 

Le scénario idéal selon lui : pouvoir alimenter en énergie solaire une boucle électrique de chauffage de l’eau chaude, qui consomme 4 à 5 kWc de puissance pratiquement 24h/24. « En y ajoutant seulement deux ou trois caissons VMC, vous absorbez déjà pas mal de la consommation de l’immeuble », affirme l’expert de l’ARC. En plus de bien « expliquer les choses » au niveau technique, administratif et économique, Christophe Levrel a voulu, dans ce guide destiné aux conseils syndicaux, leur donner un conseil : l’importance de se faire accompagner dans leur projet de solarisation. « C’est un sujet trop sérieux pour ne pas investir dans des professionnels qui vous accompagnent. Dépenser 2 000 à 3 000 euros pour un assistant à maîtrise d’ouvrage, c’est un bon investissement, car il va vous aider à choisir le bon modèle et à éviter de commettre des erreurs ».

Rendre les toitures « PV ready »

Malgré l’absence de retours d’expérience sur le photovoltaïque en copropriété, le sujet mérite qu’on s’y intéresse, la surface des toits concernés représentant un filon encore peu exploité. C’est le cas de l’Agence locale de l’énergie et du climat de Montpellier Métropole, organisatrice d’un webinaire sur le thème en 2024.

Le Grand Annecy va plus loin. Dans le cadre de son schéma directeur des énergies (SDE), qui vise à faciliter la mise en service de 120 MWc de panneaux photovoltaïques en toiture d’ici 2030, il aide les copropriétés à prendre la décision d’installer des panneaux solaires et qu’elles soient techniquement en mesure de recevoir une centrale d’une puissance d’au moins 30 kWc. Son soutien, limité à 50 000 euros par bâtiment, consiste à rembourser les dépenses liées aux travaux sur la toiture participant à la rendre « PV ready ». Plafonnée à 400 €/kWc de panneau photovoltaïque installé (soit 12 000 euros pour une centrale de 30 kWc), l’aide est complétée par une prime de 400 € par logement. Par ailleurs, le Grand Annecy prend en charge les études d’opportunité photovoltaïque et les études structures.

À ce titre, la collectivité haut-savoyarde a mandaté, l’an dernier, la coopérative citoyenne « La Solaire du Lac » pour étudier la possibilité technique et économique de procéder à une installation photovoltaïque sur quatre copropriétés : Les Asters, à Cran-Gevrier, Les Capucines et Les Clarines, à Annecy-Le-Vieux et Les Chanterelles à Seynod. « 75 % des pré-études ont été réalisées et nous avons déjà reçu des simulations de raccordements de la part d’Enedis, se réjouit François Dufournet, président de la « La Solaire du Lac ». « Nos rapports, transmis au Grand Annecy et aux différents conseils syndicaux, ont été rédigés à partir de visites circonstanciées sur site pour voir tout ce qui pouvait empêcher l’installation d’une centrale sur le toit des copropriétés, en vérifiant leur état, en examinant le passage des fluides, en situant les transformateurs », précise-t-il.

Prochaine étape : la présentation en assemblée générale des copropriétaires de projets de rénovation énergétiques qui intègrent l’installation de panneaux photovoltaïques sur les copropriétés. Ces dernières resteront entièrement libres de passer, ou non, au solaire. Elles opteront pour le mode de financement de l’installation et choisiront le mode de valorisation de l’énergie solaire qui sera produite sur leurs toits, sachant que « La Solaire du Lac » pourra, en tant que tiers investisseur, financer et exploiter les centrales, en signant un bail civil de vingt ans avec chaque conseil syndical. Dans un rapport « gagnant-gagnant » et pour un loyer annuel symbolique.   

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