D’après pv magazine International
Un projet d’extraction d’hydrogène naturel en France, lancé en 2018, suscite aujourd’hui un intérêt sans précédent de la part des experts et des politiques. Une équipe de deux chercheurs étudie en Lorraine une structure de 150 km de long, 80 km de large et 6 km de profondeur. « Nous pensons que le méthane est produit dans les couches de charbon, tandis que l’hydrogène se trouve à une grande profondeur. Nous avons besoin d’une température élevée, et la température augmente avec la profondeur. Nous considérons que la bonne température pour initier la réaction se situe entre 150 et 200 degrés, a déclaré Jacques Pironon, directeur du laboratoire GeoRessources, à pv magazine. Nous pensons trouver cette plage de température entre 5 000 et 6 000 mètres ».
250 millions de tonnes d’hydrogène
Selon leurs premiers résultats, des échantillons de la couche de charbon à 600 mètres présentent 1 % d’hydrogène, alors que ce pourcentage atteint 17 % à 1 250 mètres. Les chercheurs s’attendent à ce que cette proportion double encore à 3 000 mètres de profondeur, car « la proportion d’hydrogène blanc dans le sous-sol devrait augmenter de façon linéaire ».
Le laboratoire appartient à l’Université de Lorraine et au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Le projet est financé par le gouvernement français, la Région Grand-Est et l’Union européenne. Des rumeurs laissent entendre que le financement pourrait être augmenté. Le président français Emmanuel Macron a récemment déclaré que l’ « hydrogène blanc », ou hydrogène naturel, était une priorité pour le pays.
Pour l’heure, les deux chercheurs tentent de vérifier leur hypothèse, suggérant que l’hydrogène est produit à haute température en présence de fer. « Lorsque l’eau est en contact avec le fer, dans notre cas le carbonate de fer, de l’hydrogène peut être produit. La molécule d’eau est cassée par l’effet de réduction, un transfert d’électron, explique Jacques Pironon. Dans ce cas, la molécule d’eau est brisée. Le fer, de sa forme originale Fe2+, est transformé en Fe3+ pour équilibrer la réaction ».
L’équipe, dont la mission initiale était d’estimer la teneur en méthane du bassin lorrain, s’attend à une grande quantité d’hydrogène : 250 millions de tonnes d’hydrogène. Mais le projet pourrait en trouver encore plus. « Cette estimation pourrait changer dans quelques mois, car nous aurons plus de données. Nous nous attendons à une teneur plus élevée en hydrogène », a avancé le chercheur.
Le projet devait initialement s’arrêter à la fin de l’année, mais il se poursuivra en 2024, compte tenu de l’intérêt manifesté par le gouvernement et la région. « Nous discutons avec de nombreux partenaires. La région aimerait être le chef de file du projet, poursuit , a déclaré Jacques Pironon. Pour l’instant, je ne peux pas dire exactement le début de la nouvelle phase, car nous sommes en train de discuter. Nous discutons d’un démarrage en avril ou mai 2024 ». Selon les chercheurs, plusieurs maires de villes situées autour du gisement s’intéressent à de nouveaux secteurs, car les taux de chômage sont élevés dans la région.
Discussions avec les États-Unis, l’Australie et l’Afrique du Sud
« Pour les autorités locales, cette découverte est une bonne nouvelle. Cependant, certaines associations écologiques sont opposées à l’exploitation du sous-sol », explique le scientifique. Il est difficile pour elles de dire qu’elles sont contre l’hydrogène, mais elles n’ont pas accepté de forer ». L’équipe continuera à travailler avec la Française de l’Énergie, une entreprise spécialisée dans la production de gaz à partir d’anciennes mines, dont le siège se trouve dans la région et qui exerce ses activités en France et en Belgique. L’équipe pourrait cependant inclure de nouvelles entreprises plus importantes. La seule question en suspens est celle de la valeur commerciale de cet hydrogène.
« Nous sommes dans une phase d’exploration et nous réfléchissons à de nouveaux moyens d’explorer”, a déclaré Jacques Pironon. Les coûts sont donc encore difficiles à définir. Dans le cas de la prospection de gaz conventionnel, une société O&G est heureuse de trouver un réservoir à une pression de 200 bars, alors que dans notre cas, la pression devrait être inférieure, de l’ordre de 20 bars. Nous sommes dans des conditions très différentes ».
L’équipe souhaite développer de nouveaux concepts et de nouvelles techniques pour réduire les coûts et l’impact sur l’environnement. « Nous voulons développer un système permettant de séparer les gaz de l’eau directement dans le trou de forage. Ce système devrait également séparer les différents gaz : le méthane, l’hydrogène et l’azote, précise Jacques Pironon. Si nous devons produire de l’hydrogène, mais pas de méthane, cela est nécessaire. Nous travaillons donc à la mise au point de membranes spéciales à utiliser directement dans le trou de forage ». En collaboration avec Solexperts, le laboratoire a mis au point la sonde SysMoG, capable de séparer les gaz de l’eau dans le trou de forage et de permettre le transfert des gaz vers la surface.
Le laboratoire est en pourparlers avec des entreprises et des organismes publics en Belgique, aux Pays-Bas, au Luxembourg et en Allemagne, pays qui présentent des formations géologiques similaires. Au niveau de la recherche, l’équipe est en contact avec des ingénieurs aux États-Unis, en Australie, en Afrique du Sud, en Inde et en Chine.
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