Ce que la loi d’accélération des EnR change pour les PPA

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La loi d’accélération des énergies renouvelables, promulguée le 10 mars 2023 et publiée au Journal officiel du 11 mars 2023, apporte plusieurs évolutions sur le cadre juridique des contrats d’achat d’électricité de gré à gré (PPA). « Ces nouvelles dispositions, principalement listées dans l’article 86, interviennent dans un double contexte, a contextualisé Céline Ciriani, avocate au cabinet Gossement Avocats, lors d’un webinaire organisé le 22 février. D’une part, avec la crise énergétique, les industriels ont besoin de pouvoir s’approvisionner en électricité à des prix stables de gré à gré. D’un autre côté, il existe une volonté de l’Etat de réduire les soutiens publics, compte-tenu de la baisse des coûts de production et de la hausse des prix de l’électricité sur les marchés ».

Introduction d’une autorisation pour le producteur

Première modification introduite par la loi : les producteurs devront disposer à partir du 1er juillet 2023 d’une autorisation administrative s’ils veulent revendre l’électricité produite aux consommateurs finaux ou aux gestionnaires de réseau. « Fondée sur les exigences de l’article R333-1 du Code de l’énergie, cette autorisation d’achat pour revente vise à vérifier la capacité financière du fournisseur – et donc dans le cas d’un PPA du producteur – afin d’éviter les défauts d’approvisionnement en électricité », détaille François Versini-Campinchi, associé au cabinet LPA-CGR avocats, spécialisé en droit public et de l’énergie.

Mais dans les faits, pour les sociétés de projets (SPV) créées ad hoc pour gérer un seul actif, cette demande d’autorisation risque de virer au casse-tête. « Chaque producteur doit décrire son portefeuille de parcs renouvelables, ainsi que les moyens humains, matériels et financiers dont il dispose ou qu’il s’engage à mettre en œuvre directement pour assurer son activité de fournisseur sur le marché français. Le formulaire exige également une description des activités qu’il prévoit de sous-traiter. C’est totalement disproportionné pour une SPV qui n’a qu’un seul actif », remarque François Versini-Campinchi.

Possibilité de recourir à un tiers

C’est pourquoi le législateur a introduit une dérogation, qui autorise à « désigner un producteur ou un fournisseur tiers, déjà titulaire d’une telle autorisation, afin qu’il assume, par délégation, à l’égard des consommateurs finaux, les obligations incombant aux fournisseurs d’électricité ». « Compte-tenu de la complexité pour une SPV d’obtenir cette autorisation, il est probable que cette dérogation devienne la norme et que la majorité des producteurs y ait recours », pointe Philippe Jacques, avocat associé au cabinet LPA-CGR avocats et expert en matière de contrats commerciaux et industriels. Selon lui, difficile de ne pas y voir une mesure en faveur des utilities et des fournisseurs d’énergie, afin de leur permettre de garder un certain contrôle sur le marché de l’électricité.

L’introduction de cette dérogation soulève aussi d’autres questions : sera-t-elle valable toute la durée du PPA ou devra-t-elle être renouvelée, voire renégociée, à intervalles réguliers ? Cette délégation de services entraînera-t-elle un renchérissement des coûts des opérations ? Des délégations intra-groupes seront-elles possibles ? « Une chose est sûre, cela rajoute des contraintes pour les producteurs », analyse Philippe Jacques.

Obstacles levés pour les collectivités territoriales 

Si les collectivités pouvaient auparavant légalement nouer des PPA, dans les faits, ce type de contrat de gré à gré leur était quasiment inaccessible, en raison de la durée limitée des marchés publics de l’énergie, généralement conclus pour 2 à 4 ans. Désormais, la loi prend en compte les besoins des collectivités et introduit le fait que, toujours dans le respect de la commande publique, « la durée du contrat conclue par l’entité publique est définie en tenant compte de plusieurs critères : la nature des prestations et la durée d’amortissement des installations nécessaires à leur exécution, y compris lorsque le pouvoir adjudicateur ou l’entité adjudicatrice n’acquiert pas ces installations ». Concrètement, cela signifie que les collectivités territoriales auront maintenant la possibilité de conclure des PPA à long terme. Cette évolution permettra aux producteurs de sécuriser plus facilement leurs demandes de financement auprès des banques, étant donné que la durée du contrat de gré à gré sera désormais alignée sur la durée d’amortissement du projet.

Mécanisme de soutien mixte alliant PPA et soutien public

Autre avancée dans la loi : l’article 86 I 2° modifie l’article L.311-12 du code de l’énergie relatif aux modalités de rémunération, par un contrat d’achat ou de complément de rémunération, de l’électricité produite par les producteurs d’ENR. Dorénavant, les candidats retenus pourront donc bénéficier d’un contrat public de soutien pour tout ou partie de l’électricité produite, en parallèle d’un PPA de droit privé à conclure avec un consommateur final.

« Cette modification va favoriser les offres mixtes comprenant complément de rémunération et PPA, interprète Philippe Jacques. Pour l’Etat, elle vise surtout à réduire les niveaux de soutiens publics. Mais elle permettra sûrement en corollaire de faciliter l’accès aux PPA pour les petits off-takers. En effet, si une partie du financement de la centrale de production d’électricité est couverte par un complément de rémunération, cela réduit les risques pour le producteur en cas de défaut de son client avec qui il a conclu un PPA pour l’autre fraction de la centrale ».

Mission de surveillance

« L’article 86 va conférer à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) une mission de surveillance, autant que pour l’électricité que pour le gaz renouvelable, indique Céline Ciriani. Dans l’année qui suivra la promulgation de la loi, la CRE publiera un bilan de cette mission de surveillance ». De fait, les producteurs d’électricité qui concluent un contrat de vente directe devront donc communiquer à la Commission de régulation de l’énergie, dans un délai de deux mois à compter de la conclusion du contrat, de sa modification ou de la survenance de tout événement l’affectant, les éléments contractuels, financiers, techniques ou opérationnels.

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