D’après pv magazine International
Le nouveau règlement batteries de l’UE aménage des conditions propices à une filière européenne de batteries. Avec son Plan d’action stratégique relatif aux batteries, dont l’objectif était de créer un environnement compétitif pour ces produits, l’UE avait déjà envisagé un nouveau cadre législatif en 2017. Puis en décembre 2020, la Commission européenne a dévoilé un élément central du pacte vert pour l’Europe : une proposition de modernisation des règles régissant les batteries dans l’UE.
Après presque deux années de discussions, le Parlement européen et le Conseil des ministres se sont accordés en décembre dernier sur des modifications à apporter à la proposition d’origine. Selon toute probabilité, le règlement batteries de l’UE devrait, après approbation finale, entrer en vigueur cet été.
Apporter des réponses aux attentes
L’Europe compte environ 7 % des capacités de fabrication mondiales de batteries, mais l’extraction des matériaux et leur transformation se fait pour l’essentiel ailleurs. Les investissements à long terme dans une chaîne d’approvisionnement pour batteries ainsi que la recherche et l’innovation dans ce domaine resteront donc dépendants d’un cadre législatif prévisible, clair et cohérent. Le nouveau règlement fixe de nouvelles règles de compétitivité.
Recharge, qui a milité pendant des années pour la mise en place d’obligations en matière d’empreinte carbone et de responsabilité sociale, accueille favorablement l’introduction de telles mesures. Ces dispositions sont étayées par une approche visant des conditions de concurrence équitable et la transformation des forces du marché pour inciter les consommateurs à acheter des batteries durables. Les dispositions concernant l’intensité de carbone ainsi que le devoir de diligence sont en mesure non seulement d’empêcher les batteries non performantes de pénétrer dans l’UE, mais aussi de faciliter la réalisation des objectifs de neutralité climatique et de développement durable de l’Union. Si elles sont correctement appliquées, ces mesures disposent d’un potentiel inégalé pour promouvoir la compétitivité européenne sur la base de la durabilité et de la responsabilité.
En effet, outre les coûts et la performance, le développement durable constitue désormais un critère de compétitivité. À condition qu’elles soient bien mises en œuvre, les mesures en faveur de la durabilité fixeront les règles pour la vente des batteries en Europe. En la matière, surveillance de l’exécution et contrôle des dispositions sont les maîtres-mots.
Quelques chiffres-clés
Désormais, les batteries devront afficher leur empreinte carbone et éventuellement respecter un plafond : cela s’appliquera d’abord aux batteries des véhicules électriques (VE), avec une déclaration obligatoire à partir de la fin de l’année prochaine. Des catégories de performance permettant d’orienter le consommateur dans son choix arriveront à la mi-2026 et les batteries de VE ayant une empreinte carbone élevée seront exclues par la mise en place d’un plafond à compter de fin 2027. La déclaration des émissions de CO2 sera obligatoire pour les batteries industrielles dès la fin 2025, à partir de mi-2028 pour les moyens de transport légers (MTL) (par ex. vélos électriques et trottinettes électriques) et de mi-2030 pour les batteries industrielles rechargeables avec stockage externe.
Les batteries industrielles, pour VE, de démarrage, d’éclairage et d’allumage (telles que celles utilisées pour démarrer les voitures) auront ainsi l’obligation d’indiquer la quantité de cobalt, de plomb, de lithium et de nickel recyclés qu’elles contiennent à partir de 2028 et d’atteindre des objectifs minimum à compter de mi-2031. Il en sera de même pour les MTL à partir de mi-2036. Dès 2027, les batteries industrielles, pour VE et pour MTL devront posséder un passeport batterie, accessible grâce à un code QR renvoyant vers un identifiant unique.
Les entreprises enregistrant un chiffre d’affaires d’au moins 40 millions d’euros devront respecter un devoir de diligence concernant la provenance du cobalt, du lithium, du nickel et du graphite naturel à partir de mi-2025 et gérer les risques sociaux et environnementaux liés à la provenance, à la transformation et au commerce des matières premières et recyclées.
Les fabricants de batteries portables sont obligés de collecter 45 % de leurs déchets cette année, chiffre qui montera à 73 % d’ici la fin de la décennie ; les objectifs pour les batteries de MTL sont de 51 % d’ici la fin 2028 et de 61 % trois ans plus tard. Les batteries au lithium doivent atteindre un objectif de recyclage de 65 % du poids moyen d’ici à 2025, et de 70 % d’ici à 2031.
Points faibles de la règlementation
Les orientations de la Commission seront déterminantes pour appliquer de manière sûre les exigences en matière d’enlèvement et de remplacement prévues par l’article 11 du règlement, qui s’appliqueront à partir de fin 2026. Recharge donnera des recommandations sur le moyen d’y parvenir.
Par ailleurs, la responsabilité d’assurer la collecte et le recyclage corrects des batteries en fin de vie doit être assignée au bon acteur de la filière. En effet, si le producteur identifié comme portant la responsabilité élargie du producteur en vertu du règlement n’est pas le dernier opérateur fournissant le produit à un distributeur ou un consommateur, il sera alors impossible de comptabiliser le nombre de produits qui entrent sur le marché d’un État membre donné de l’UE.
Durabilité, compétitivité
Si le secteur européen de la fabrication des batteries reste relativement restreint, il devrait tout de même créer quelque 800 000 emplois au cours de la décennie, à condition que l’Europe parvienne à augmenter ses parts de marché à 20 %. Pour exploiter pleinement le potentiel du secteur, il faut un ancrage solide des règlementations. Il sera donc essentiel de spécifier avec soin les détails techniques relatifs à certains articles de la législation révisée à venir, et de clarifier les éventuelles contradictions dans le document d’orientation de la Commission. Recharge travaillera en collaboration avec les législateurs à la vaste tâche de mettre en œuvre la législation et de traduire les ambitions de l’UE en règles constructives.
Le secteur est ouvert à la discussion sur la législation révisée, prêt à déterminer la faisabilité et l’efficacité du règlement. La proposition de règlement relatif aux batteries de la Commission représente un jalon important dans la feuille de route du Plan d’action stratégique relatif aux batteries. Le véritable test quant à l’efficacité de ces nouvelles règles aura lieu cette année, lorsqu’elles devraient entrer en vigueur.
À propos de l’auteure : Kinga Timaru-Kast est directrice des affaires publiques et de la communication chez Recharge, l’association pour les batteries d’avant-garde rechargeables et au lithium. Elle a commencé sa carrière dans les affaires publiques et la communication en 2006 à Bruxelles chez SolarPower Europe, où elle a travaillé pendant neuf ans. Elle a exercé le poste de Directrice de la communication chez EuroCommerce, Grayling et le réseau européen de parlementaires pour la promotion des énergies renouvelables EUFores avant de rejoindre Recharge en 2021.
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