D’après pv magazine international.
À l’heure où les propriétaires de centrales solaires concentrent leurs efforts sur le renforcement des performances et de l’efficacité de leur exploitation, pas question de négliger le choix des câbles en c.c. En s’appuyant sur l’interprétation des normes CEI et en tenant compte de facteurs tels que la sûreté, les gains des panneaux bifaciaux, le courant admissible du câble, les pertes au niveau des câbles et la chute de tension, les propriétaires sont en mesure de déterminer le câblage adapté pour garantir une exploitation sûre et stable tout au long du cycle de vie d’une installation PV donnée.
Sur le terrain, les conditions environnementales ont des répercussions considérables sur les performances des modules solaires. Le courant de court-circuit figurant sur les caractéristiques techniques d’un module PV est calculé pour des conditions d’essai standard, à savoir une irradiation de 1 kW/m2, un spectre solaire AM de 1,5 ainsi qu’une température de cellule de 25 °C. Le courant indiqué ne tient donc pas compte du courant de la surface arrière dans les modules bifaciaux, de sorte que certains facteurs, tels que le cloud enhancement (la hause de l’irradiation par temps nuageux), la température, les pics de rayonnement et l’irradiation excessive entraînée par l’albedo sur la surface arrière, peuvent avoir un effet considérable sur le courant de court-circuit réel des modules PV.
Choisir les bons câbles
Les câbles c.c., qui relient les modules aux boîtiers de jonction et aux onduleurs, constituent le cordon ombilical des installations PV.
Les propriétaires de centrales doivent s’assurer que la section de câble utilisée est bien adaptée à l’intensité et à la tension de l’installation. Ainsi, les câbles reliant la section c.c. d’une installation PV connectée au réseau doivent aussi pouvoir résister à des conditions extrêmes en termes d’environnement, de tension et d’intensité, et notamment aux effets thermiques du courant et de l’ensoleillement, surtout s’ils sont installés à proximité des modules.
Voici quelques éléments à prendre en compte absolument.
La conception du câblage
Lors de la conception des systèmes photovoltaïques, des considérations de coûts à court terme peuvent mener à la sélection d’un équipement de qualité médiocre et engendrer des problèmes de sûreté et de performance sur le long terme, voire même avoir des conséquences catastrophiques comme des incendies. Les éléments suivants doivent être évalués avec soin afin de respecter les normes nationales en matière de sûreté et de qualité :
- Chute de tension maximale : Il convient de limiter les pertes d’énergie dues au câblage, qu’il s’agisse des pertes de c.c. au niveau des strings de panneaux solaires ou des pertes de c.a. au niveau de la sortie des onduleurs. Une solution consiste à minimiser la chute de tension dans les câbles. En général, une chute de tension en c.c. de moins de 1 % est souhaitable, un chiffre qui ne doit pas dépasser 2 %. De plus, une chute de tension en c.c. importante augmente la répartition de la tension des strings PV reliés au même régulateur MPPT (maximum power point tracking), ce qui entraîne une hausse des pertes par défaut d’adaptation.
- Pertes au niveau des câbles : Afin de garantir le rendement énergétique, il est recommandé que les pertes au niveau du câblage BT dans son ensemble (des modules au transformateur) n’excèdent pas 2 %, et se situent dans l’idéal à 1,5 %.
- Courant maximal admissible du câble : Certains facteurs de réduction doivent être pris en compte, tels que la méthode de pose des câbles, les hausses de température, la distance de pose ainsi que le nombre de câbles en parallèle, qui réduisent le courant admissible des câbles.
Normes CEI pour panneaux bifaciaux
Les normes sont indispensables pour garantir la fiabilité, la sûreté et la qualité des installations PV, et notamment des câbles. Il existe plusieurs normes reconnues au niveau mondial pour l’utilisation des câbles en c.c. Les normes CEI figurent parmi les plus complètes.
La norme CEI 62548 fixe des exigences de conception pour les dispositifs PV, y compris le câblage en c.c., les dispositifs de protection électrique, les commutateurs et la mise à la terre. La dernière version de la norme CEI 62548 spécifie la méthode de calcul du courant pour les modules bifaciaux. La norme CEI 61215:2021 donne la définition des modules PV bifaciaux et précise les exigences en matière d’essai pour ces derniers. Elle introduit les conditions de test de rayonnement solaire pour les modules bifaciaux, à savoir : le BNPI (bifacial nameplate irradiance), au cours duquel l’avant du module PV reçoit 1 kW/m2 de rayonnement solaire et l’arrière 135 W/m2 ; et le BSI (bifacial stress irradiance), pour lequel le module reçoit un rayonnement solaire de 1 kW/m2 à l’avant et 300 W/m2 à l’arrière.
Protection contre les surcharges de courant
Un appareil de protection contre les surcharges de courant sert à se prémunir des effets potentiellement dangereux des surintensités électriques, des courts-circuits ou des défauts à la terre. Les plus fréquemment utilisés sont les disjoncteurs et les fusibles.
L’appareil de protection contre les surcharges coupe le circuit lorsque le courant inverse excède la valeur d’intensité de protection, de sorte que les courants direct et inverse passant dans le câble c.c. ne soient jamais supérieurs au courant nominal de l’appareil. Dans ce cas, le câble c.c. devrait admettre un courant égal à l’intensité nominale de l’appareil de protection contre les surcharges.
La formule
Iz>=In. Avec Iz le courant maximal admissible du câble dans des conditions de fonctionnement normal et In le courant nominal de l’appareil de protection contre les surcharges.
Courant nominal de protection contre les surcharge In=1,1 ´ NSA´ ISTRING MAX. Où NSA est le nombre de strings branchés en parallèle, ISTRING MAX est l’intensité max des strings PV : ISTRING MAX = 1,25 * KCorr x ISC MOD, où Kcorr est un facteur de correction de l’emplacement et de la conception. Pour les modules bifaciaux, il est généralement de 1,1 (il peut toutefois être déterminé à l’aide d’autres méthodes spécifiées dans la norme CEI 62548). ISC MOD est le courant de court-circuit du module.
Si le circuit ne comporte aucun appareil de protection contre la surintensité, les propriétaires de centrales doivent prendre en compte le courant direct maximal ainsi que le courant inverse maximal pouvant circuler dans le câble en c.c. et retenir la valeur la plus élevée des deux pour choisir leur câble.
Conditions d’installation
Lors de la conception et de l’installation du câblage en c.c., il est crucial de calculer le courant maximal admissible du câble dans certaines conditions sur le terrain, afin de s’assurer que le câble n’est pas soumis à une surintensité. Il est possible d’utiliser une formule empirique pour déterminer le courant maximal admissible du câble après réduction (Iz) : la formule comprend différents facteurs faisant varier le courant maximal admissible nominal (I0), notamment différentes températures au sol (f1), de multiples câbles posés en parallèle directement dans le sol (f2), la résistance thermique du sol (f3) et les profondeurs d’enfouissement (f4).
Cas d’étude au Moyen-Orient
Une centrale PV au sol à grande échelle installée au Moyen-Orient a suivi le processus suivant pour étudier et déterminer le meilleur choix de câbles en c.c. dans un souci de sûreté et de performance.
Le dispositif PV est composé de : modules bifaciaux, produisant 540 W à leur taux d’utilisation maximum ; une tension nominale de 41,3 V, un point de puissance maximum de 13,13 A, un courant de court-circuit de 13,89 A et un coefficient de bifacialité des modules PV de 70 % ; 28 modules en série sur un string PV ; le support présente un système de traceur horizontal à axe unique et la hauteur au sol est de 1,5 m ; un boîtier de jonction c.c. avec 16 entrées et 1 sortie est adopté ; le dispositif PV dans son ensemble comporte 30 boîtiers de jonction c.c. intégrés dans des onduleurs centralisés ; Kcorr est de 1,1, simulé par le logiciel PVsyst ; courant maximal admissible souhaité Iz=In=1,1 ´ NSA´ ISTRING MAX=1,1*16*1,25*1,1*13,89=336,14 A ; facteur de réduction total : Ktot= 0,93´0,75´0,8´1=0,558 ; et courant maximal admissible nominal du câble : I0=Iz/Ktot=336,14/0,558=602,4 A.
En se fondant sur la configuration du dispositif PV, le courant maximal admissible nominal du câble en c.c. utilisé dans ce cas devrait être supérieur à 602,4 A.
Le courant maximal admissible nominal du câble est choisi en fonction des caractéristiques techniques indiquées par le fabricant (ou en fonction de la norme de sélection de câble CEI 60364-5-52, auquel cas le coefficient de réduction correspondant doit être choisi conformément à cette norme).
L’application de cette formule a abouti à une recommandation de deux câbles c.c. en parallèle 2×300 mm2 en aluminium reliant le boîtier de jonction du string PV à l’onduleur. La longueur du câble a également été réévaluée pour s’assurer que la chute de tension du câble en c.c., ainsi que les pertes totales au niveau des câbles, était conforme aux exigences propres au projet. Afin de garantir une chute de tension en c.c. inférieure à 2 %, les spécifications pour certains câbles longue distance devraient en effet adopter une section de 2×400 mm2 au lieu de 2×300 mm2. À noter en outre que les coefficients de pose des câbles devront encore être réduits si deux câbles sont installés en parallèle.
En raison du rayonnement, de la hausse de la température, des gains à l’arrière des modules bifaciaux et du coefficient de réduction des câbles, il faut opter pour des câbles c.c. d’un diamètre plus important, ce qui accroît les coûts. Dans l’optique de contrôler les coûts et d’assurer la sécurité de la centrale, il convient de raccourcir la longueur du câble ou de limiter le courant c.c. par des équipements électroniques de puissance tels que des onduleurs strings.
Choix des équipements et onduleurs
Dans une configuration comprenant un onduleur central, plusieurs strings PV sont branchés en parallèle sur un boîtier de jonction c.c., et plusieurs boîtiers de jonction sont reliés, en parallèle, à l’onduleur.
Ainsi, le courant de sortie maximum au niveau du boîtier de jonction et le courant d’entrée au niveau de l’onduleur varient constamment et présentent de grandes incertitudes. Il existe donc des risques de sûreté et des marges de conception supplémentaires qu’il faut prendre en compte lors du choix de l’équipement électrique (fusibles, sectionneurs et câbles au niveau du module solaire et du dispositif PV), ce qui augmente de manière significative les coûts finaux d’installation et de fournitures.
À l’inverse, les solutions d’onduleurs strings permettent de convertir une énergie fluctuante et incertaine du côté PV en une électricité maîtrisable. L’onduleur limite le courant de sortie. Ainsi, le diamètre du câble de sortie de l’onduleur n’est pas tenu de prendre en compte les changements au niveau de la luminosité et de la température ou la bifacialité. Cela permet aux concepteurs de choisir les câbles ainsi que les appareils de protection contre la surintensité présentant le meilleur rapport coût-efficacité. Qui plus est, les onduleurs strings disposent d’un câble c.c. plus court et d’une chute de tension en c.c. plus faible, avec pour résultat moins de pertes par défaut d’adaptation et une production d’électricité inhérente plus importante.
Contrairement aux centrales électriques traditionnelles, le courant de fonctionnement des modules PV est considérablement influencé par les conditions environnementales et les gains des panneaux bifaciaux. Ces facteurs doivent donc être pleinement pris en considération lors du choix des câbles pendant la phase de conception, de même que les limitations de la chute de tension et des pertes au niveau des câbles, afin d’assurer le retour sur investissement à long terme des centrales photovoltaïques.
Traduit par Christelle Taureau.
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