Par Cosmas Mwirigi, pv magazine global
En l’absence de cadres réglementaires nationaux visant à soutenir les énergies renouvelables, la transition énergétique pourrait rester un rêve lointain en Afrique, selon le PDG da la société italienne Enel Green Power, Salvatore Bernabei. Ce dernier s’est exprimé lors d’un séminaire en ligne consacré à la transition énergétique en Afrique organisé par la Commission européenne, la Commission de l’Union africaine, la présidence portugaise du Conseil européen, et soutenu par la Banque européenne d’investissement, la Banque africaine de développement et le partenariat Afrique-UE pour l’énergie. « Certains pays, comme l’Afrique du Sud, le Maroc et l’Égypte, ont d’excellentes politiques réglementaires. Toutefois, nous ne pouvons pas avoir un impact significatif avec seulement trois pays », souligne M. Bernabei.
Frans Timmermans, vice-président exécutif pour un Green Deal européen, a profité de ce séminaire pour affirmer que l’UE et ses États membres étaient prêts à aider les gouvernements africains à mettre en place les politiques nécessaires pour provoquer des investissements du secteur privé dans les énergies vertes. Ainsi, sous les auspices de l’initiative Afrique-UE pour l’énergie verte, l’Union européenne et l’Union africaine vont enfin tisser un partenariat dans le domaine de l’énergie visant à stimuler les investissements dans la production d’énergie propre, à améliorer l’accès à l’électricité et à promouvoir l’efficacité énergétique.
« Nous ne pouvons pas nous limiter à un accès à l’énergie basé sur six heures d’électricité par jour, ce qui est à peine suffisant pour brancher un ventilateur, une radio et une télévision. Nous devons voir grand. Nous avons besoin d’un accès à une échelle qui puisse réellement contribuer au développement économique et à l’industrialisation de l’Afrique » déclare Frans Timmermans, affirmant que 30% du budget du partenariat extérieur de l’UE seraient consacrés aux investissements dans le domaine du changement climatique au cours des sept prochaines années.
Frans Timmermans souligne, par ailleurs, la nécessité d’élaborer des politiques de soutien, notamment en matière de réforme du secteur de l’énergie, de tarification du carbone et d’accès à des financements abordables dans les pays africains. D’après Koen Doens, directeur général des partenariats internationaux pour la Commission européenne, le renforcement des liens entre les entreprises africaines et européennes peut également jouer un rôle important.
Francesco La Camera, directeur général de l’Irena, insiste quant à lui sur l’importance d’élargir le débat au-delà des technologies à déployer et des intérêts nationaux. Selon lui, les infrastructures transfrontalières et régionales seraient plus efficaces pour exploiter les avantages industriels et de développement. Il ajoute que les 2,7 GW de capacité solaire installés en Afrique l’année dernière ne représentent que 0,01% des projets d’énergies renouvelables ajoutés dans le monde.
L’Afrique aura besoin d’une décennie pour fournir un accès à ses 600 millions d’habitants qui ne bénéficient pas encore de l’énergie, précise le commissaire de l’Union africaine chargée des infrastructures et de l’énergie, Amani Abou-Zeid. « Nous devons de toute urgence réfléchir à des moyens novateurs pour mobiliser des ressources et inviter le secteur privé comme les gouvernements à participer à ce voyage vers l’accès à l’énergie verte », ajoute-t-elle. « Connecter 600 millions de personnes à l’électricité n’est pas seulement un défi, mais aussi une grande opportunité commerciale pour les deux continents », réagit Kandeh Yumkella, co-président du groupe stratégique pour l’énergie de la Fondation Afrique-Europe.
Alors qu’Hela Cheikhrouhou, PDG de Nithio Holdings – une plateforme de financement de l’énergie basée à Washington DC –, aborde les avantages que pourrait offrir le financement mixte, composé de fonds publics et privés, Frans Timmermans réagit à nouveau : « Au regard de la carte du monde il y a dix ans, le charbon était l’option la moins chère pour produire de l’électricité, à quelques petites exceptions près. Aujourd’hui, dans les appels d’offres, les énergies renouvelables sont moins chères que les centrales au charbon les moins chères. L’année dernière, nous avons vu des prix d’enchères record pour l’énergie solaire en Éthiopie, en Arabie saoudite, au Mexique et au Chili. […] Les combustibles fossiles ne sont pas une bonne affaire et nous n’essaierons jamais de convaincre nos partenaires en Afrique d’acheter des technologies de combustibles fossiles d’occasion. L’objectif [du partenariat prévu entre l’UE et l’Afrique] est d’améliorer le transfert de technologies, et de stimuler la transition vers de nouvelles ressources énergétiques. »
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